Big Brother vous regarde (et vous aime) !

Gentiment emprisonné dans un autocar à rayon d’action régional, je longeais l’autre hier les coteaux radieux où la solitude des modernes qui ont les moyens rime avec végétation exubérante et vieilles demeures avantageusement retapées. Soudain, l’entrée d’une de ces vastes emprises industrielles qui font bêler d’optimisme les crétins de ma cité, aussi arrogante que creuse, sur le thème de l’innovation, de la compétition, de la technologie, etc. Voilà pas que j’avise sur un des deux piliers qui marquent l’accès à cette perle du progrès la devise suivante : Life augmented. Outre que la volonté de déshonorer notre pauvre langue est ici patente, une sorte de syncope de mon esprit, accompagnée de sifflements d’oreille, m’avertit que j’étais en présence d’une intention de nuire caractérisée (par la propagande). Car comment traduire en toute équité cette sordide prétention publicitaire sinon par les équivalents qui suivent : plus grand que la vie ou bien, pourquoi pas ? plus belle la vie ? Qu’est-ce qui a pu présider à l’invention de ce triste slogan, sachant que la vie est précisément le lieu de vérification de la géniale équation spinoziste : « Par réalité et perfection, j’entends la même chose ». J’ai toutes raisons de penser que la genèse de cette bourde est à rechercher dans l’immonde artisanat d’un communicant parvenu au dernier degré de l’impudence, suggérant à des ingénieurs et des dirigeants, donc autant dire, en gros, à des ignorants, que le lifting de la vie dorerait le blason de l’entreprise. C’était sans compter avec le droit d’antériorité de dirigeants germains qui, il y a plus d’un demi siècle, avaient pris date en prétendant libérer les hommes en les enfermant, quand ce n’était pas en les liquidant… Life augmented ? Arbeit macht frei !

 

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