À la belle saison, je quitte le centre de la cité (arrogante et creuse) en marche dite nordique, par des chemins discrets et détournés, sans juger utile de couvrir mon torse avantageux, crainte que la chaleur ne m’assaille d’emblée, et portant, rentré dans la ceinture de mon cuissard, un tricot de peau arachnéen que je revêtirai au retour pour épargner la pudeur de mes imbuvables concitoyens. C’est dire si je suis vraiment un tout petit exhibitionniste. Las ! c’est compte non tenu de la rouerie polymorphe du tout jeune enfant. Trop souvent, parvenu aux faubourgs, il m’arrive de croiser un père ou une mère accompagné de son fils ou sa fille, le sexe ne changeant rien à l’affaire, et, invariablement, retentit l’exclamation (sur la probabilité de laquelle je parierais gros à chaque fois) : « Papa, Maman, pourquoi le monsieur il est tout nu ? » Aux antipodes de ce que postulent nos dérisoires « chercheurs » en anthropologie, sociologie, ou autre, pas besoin d’aller chercher midi à quatorze heures. En bons petits sycophantes, courtisans quémandant la faveur de plus puissants qu’eux, ces adorables petits lèche-cul savent très bien que je suis seulement torse nu, mais me prétendre tout nu fait d’eux d’inflexibles défenseurs de la décence, des moralistes en herbe. Sous les meilleurs auspices (et les plus tristes), ils inaugurent ainsi leur carrière sociale.