Chaque quinze août, cette fête heureusement discréditée de nos jours, Oncle Louis et Tante Line rendaient visite à notre grand-mère dans leur vieille Peugeot 203. Ils s’aimaient (comme on ne le sait plus) depuis des décennies…
Tante Line était porteuse, sempiternellement, d’un très gros paquet de bonbons destiné à l’innombrable marmaille. Les petits hypocrites – dont j’étais – se précipitaient pour l’embrasser, les yeux pleins de hâte et de convoitise. Toujours, elle brisait net cet élan : « Arrière, s’écriait-elle, vous n’allez pas salir ces belles lèvres roses au contact de ma vieille peau ! » Et son contentement (peut-être même son attendrissement) n’était pas feint de nous voir nous partager, en se chamaillant, le magot de sucre.
Je n’oublierai pas son exemple, rugueux et beau, qui fut dès lors mon modèle pour ce qui est, soit dit en passant, une absurdité : le dialogue entre générations.
Les vieux ce sont les détrousseurs des cadavres des jeunes. Le rôle de la vieillesse est de détrousser des cadavres. La vieillesse se repaît de la jeunesse.
Thomas Bernhard Gel 1967
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Comme il peut être bon, pourtant, transgressant l’interdit de la vieille délicate, de se laisser surprendre par la douceur de cette peau fripée.