Une formule de politesse

Jointe à mon espièglerie, mon insoumission native m’avait conduit dans le bureau directorial, devant le proviseur de cet établissement réservé aux rejetons des classes supérieures de la cité, pour recevoir une semonce d’anthologie. Front baissé, je laissais couler sur ma face indigne un flot de reproches agrémenté de menaces ; je bouillais intérieurement mais savais d’expérience que, un jour ou l’autre, il m’en cuirait nécessairement, je me savais donc coupable par nature. Quand le dignitaire eut fini de me pourrir, il me dit : « Vous pouvez disposer. » Je n’avais pas la moindre idée de ce que cela pouvait bien signifier. Il répéta : « Vous pouvez disposer. » sur un ton qui m’indiqua que j’allais au devant de quelque ennui supplémentaire. Lapin dans les phares d’une automobile, je ne bougeai pas, comme fasciné par l’imminence du désastre. Soudain rouge écarlate, il hurla (comme s’il avait craché) : « Foutez le camp ! » Les joues en feu, humilié comme jamais, je pris la porte.

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